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Enseignement/Apprentissage de la Prononciation du Français

Enseignement/Apprentissage de la Prononciation du Français
5 mars 2021

Middlemarch

 

 

            

 

     Je lis dans Middlemarch (1871) de George Elliot :

 

(Livre III, Chapitre XXXII)

Il se dirigea alors vers le bureau de Mlle Garth, ouvrit un livre posé dessus et en lut le titre sur un ton solennel et pompeux comme s'il le mettait aux enchères : "Anne de Geierstein (qu'il prononça "Jirstine") ou la fille des brumes, par l'auteur de Waverley. Puis, tournant la page, il commença d'une voix sonore : "Près de quatre siècles se sont écoulés depuis que la suite d'événements relatés dans les chapitres qu'on va lire eurent lieu sur le Continent". En prononçant ce dernier mot vraiment admirable, il mit l'accent sur la dernière syllabe, non par ignorance de l'usage courant, mais en estimant que cette articulation nouvelle rehaussait la beauté sonore qu'il avait donnée à l'ensemble.

      Et en version originale :

He now walked to Miss Garth’s work-table, opened a book which lay there and read the title aloud with pompous emphasis as if he were offering it for sale: “‘Anne of Geierstein’ (pronounced Jeersteen) or the Maiden of the Mist, by the author of Waverley.’” Then turning the page, he began sonorously—“The course of four centuries has well-nigh elapsed since the series of events which are related in the following chapters took place on the Continent.” He pronounced the last truly admirable word with the accent on the last syllable, not as unaware of vulgar usage, but feeling that this novel delivery enhanced the sonorous beauty which his reading had given to the whole.

 

   Cela me rappelle ce que m'avait raconté Adeline quelques mois après son installation sur la côte Est des Etats-Unis en 1989. Evoluant dans le milieu artistique étant musicienne, elle s'était étonnée et amusée d'une prononciation branchée du mot "artist" (normalement prononcé avec la première syllabe accentuée [ˈärdəst] - selon google traduction), mais l'accent porté sur la dernière syllabe et dont la nouvelle orthographe nous mettait en joie :  an arteest... en effet beaucoup plus chic !

 

     Et vous, connaissez-vous d'autres exemples de prononciation de mots de l'anglais avec des changements de syllabe accentuée ?

 

 

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1 mars 2021

On parle des accents à la télévision !

    

 

   Philippe me signale un numéro du magazine télévisé "20h30 le samedi" de France 2 (27/02/2021) qui consacre un reportage de 10 minutes aux accents de France.

     On y traverse le Laboratoire de la Parole et du Langage d'Aix - Marseille Université, avec Médéric Gasquet Cyrus et les archives sonores de la Bibliothèque Nationale de France, avec son conservateur Pascal Cordereix. On y mélange les accents régionaux et les expressions régionales, on y mentionne le mythe d'un français sans accent et on y entend beaucoup d'illustrations (je retiens en particulier les deux versions de la rose [ʁoːz / ʁɔz] de la chanson de Francis Cabrel...)

     On y rappelle la loi "contre la glottophobie", dont il faudra reparler ici puisqu'elle ne fait référence qu'aux accents régionaux sans mentionner les accents nationaux...

     Bref, ce reportage grand public survole de nombreuses questions et semble laisser perplexes les apprenants du "français standard"...

 

 

14 janvier 2021

Les enquêtes phonétiques de Ferdinand Brunot

 

      Emmanuelle me fait parvenir un lien pour accéder à une archive sonore mise en ligne par France Culture. La page de France Culture donne beaucoup d'informations et de liens intéressants (par exemple, un des plus vieux documents sonores, enregistré en 1891), ainsi qu'une transcription orthographique de l'archive.

 

 

     Il s'agit de l'enregistrement réalisé en 1912 d'un entretien entre Ferdinand Brunot, linguiste, et Louis Ligabue, tapissier parisien du 14ème arrondissement (Brunot fut maire du 14ème arrondissement de 1910 à 1919). L'homme s'exprime sur son accent parisien et réagit ensuite à son propre enregistrement. Cela me semble un modèle de protocole expérimental : recueillir des données auprès d'un informateur, certes, mais lui demander ensuite de s'exprimer sur la tâche réalisée. J'ai été également frappé par le registre de la langue : il est vrai qu'il s'agit d'une situation formelle et M. Ligabue a l'habitude de traiter avec une clientèle bourgeoise, mais les énoncés toujours complets présentent un lexique et une syntaxe qui me semblent aujourd'hui particulièrement soignés pour de la parole spontanée.

 

 

     C'est l'occasion de rappeler que Ferdinand Brunot (1860-1938), professeur d'Histoire de la langue française à la Sorbonne dès 1900, crée en 1911 les Archives de la Parole et l'Institut de Phonétique en 1925. Le Musée de la Parole et du geste / Institut de Phonétique de Paris s'installe en 1928 au 19 de la rue des Bernardins à Paris 5ème. En 1968, ce département universitaire est intégré à la Sorbonne-Nouvelle Paris 3. Les Archives de la Parole sont transférées à la BnF.

 

    Lors de la prochaine rentrée universitaire, l'ensemble des départements de Paris 3 s'installera sur le tout nouveau campus de Nation, ce qui marquera l'abandon de l'Institut de Phonétique de la rue des Bernardins.

 

Le Parisien, le 5 janvier 2021

 

 

 

 

27 décembre 2020

Hervé Le Tellier

 

     Le Prix Goncourt 2020 a été attribué le 30 novembre dernier à Hervé Le Tellier pour son roman L'Anomalie.

 

     Brillant écrivain et irrésistible oulipien, Hervé Le Tellier a participé pendant de nombreuses années à la "récréation littéraire" de France Culture : Des papous dans la tête.

     C'est l'occasion de faire ré-entendre ici le début de sa biographie d'Auguste Pataquès (France Culture, 01/11/2015) dont je me suis déjà servi en bonus d'un post sur... les liaisons bien sûr. Cliquer sur le lien ci-dessous :

 

Auguste Pataquès

 

 

 

 

 

 

11 octobre 2020

Si t'as été à Tahiti... La réponse !

 (posté le 21 septembre 2020)

 

     Je découvre, sur la radio FIP, un succès de la fin des années 1950 : Si t'as été à Tahiti, (Paroles et Musique : Robert Pierret et Jean Guillaume, 1958), interprété par P.A.O.L.A. 

     Cette chanson exploite à l'excès une caractéristique phonétique du français. Le titre est à peu de chose près le titre d'une leçon d'un manuel de phonétique...

De quelle caractéristique phonétique s'agit-il?

(J'attends votre réponse en Commentaires à la fin de ce post...

Ma réponse dans quelques jours.)

    

Voici la transcription orthographique de la chanson. Comme d'habitude, j'ai mis entre parenthèses ce qui n'est pas prononcé.

Dis, où t(u) as été cet été?
Moi j’ai été à Tahiti
Si t(u) as été à Tahiti
C’est-i(l) qu(e) tu y-as été à pied?

J’ai pris ma moto
J(e) l’ai mis sur mon dos
Et je suis parti pour Tahiti
J’ai pris mon vélo
J’ai dit : (il) va faire chaud
Et je suis parti pour Tahiti

Si t(u) as été à Tahiti
T(u n)’as pas pu y aller à moto, hein?
Si t(u) as été à Tahiti
T(u n)’as pas pu y aller à vélo, non, non, non

J’ai pris mon dada, vas-y mon p’(e)it gars
Et je suis parti pour Tahiti
J’ai pris mon boa, j(e) l’ai mis sous mon bras
Et je suis parti pour Tahiti

Si t(u) as été à Tahiti
T(u n)’as pas pu y aller à dada, ha ha
Si t(u) as été à Tahiti
T(u n)’as pas pu y aller à boa, ça marche pas!

J’ai pris mon cerceau, j’ai mis mon chapeau
Et je suis parti pour Tahiti
J’ai pris mon bateau, je l’ai mis sur l’eau
Et je suis parti pour Tahiti

Si t(u) as été à Tahiti
T(u n)’as pas pu y aller à cerceau
Si t(u) as été à Tahiti
T’as pu y aller qu’en bateau
Qu'en bateau...

 

 

(la réponse du jour ...)

 

Il s'agit de... l'enchaînement vocalique !

 

 L'enchaînement vocalique retient généralement moins l'attention que l'enchaînement consonantique ( ex : "une amie" prononcé [y-na-mi] et non pas * [yn-a-mi]) ou que la liaison (ex : "un ami " prononcé [œ̃-na-mi] et non pas [œ̃-a-mi]). Pourtant l'enchaînement vocalique fait partie des phénomènes de liens euphoniques favorisant la fluidité du français oral.

 

 

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22 septembre 2020

Un chewing-gum phonétique?

 

 

 

La première fois que je l'ai vue, elle dormait à moitié nue dans la lumière de l'été au beau milieu d'un champ de blé.

 

 

Question : Pouvez-vous découper la phrase ci-dessus en groupes rythmiques courts?

(mon découpage est un peu plus bas...)

 

 

 

 

 

 

Réponse : La première fois / que je l'ai vue / elle dormait / à moitié nue / dans la lumière / de l'été / au beau milieu / d'un champ de blé.//

 

(On ne peut pas faire de groupes rythmiques plus courts à part le dernier qu'on pourrait couper en deux : d'un champ / de blé.// Mais pour des raisons d'équilibre temporel, on gardera / d'un champ de blé / comme un seul groupe. Si vous souhaitez discuter ce découpage, merci de laisser un commentaire en fin de ce post).

 

Il s'agit d'une phrase extraite d'une chanson que vous entendrez tout à l'heure - si vous ne l'avez pas déjà reconnue. Les groupes rythmiques sont composés du même nombre de syllabes. Combien y a-t-il de syllabes dans chaque groupe rythmique ? Comment faire pour que chaque groupe ait le même nombre de syllabes ?

 

Le nombre commun de syllabes est 4. Il y a 8 groupes rythmiques. Donc un total de 8x4 = 32 syllabes. Vérifions chaque groupe rythmique. Je mets au passage en gras les syllabes accentuées :

 

1. La-pre-mière-fois (dans la troisième et la quatrième syllabes, ce sont des semi-consonnes [mjɛʁ] [fwa] et non pas des voyelles, il y a donc bien 4 syllabes) ;

2. que-je-l'ai-vue (en parole naturelle, le e de je aurait pu être effacé : que j(e) l'ai vue) ;

3. e-lle-dor-mait (en français standard, il n'y a que 3 syllabes : elle - dor - mait. Il faut donc ici prononcer le e final de mot avant consonne : e-lle-dor-mait, pour obtenir les 4 syllabes) ;

4. à-moi-tié-nue (dans les deuxième et troisième syllabes, on trouve des semi-consonnes [mwa] [tje] et non pas des voyelles) ;

5. dans-la-lu-mière (dans la dernière syllabe, c'est une semi-consonne [mjɛʁ] et non pas une voyelle) ;

6. de-l'é- (3 syllabes... Pour trouver une quatrième syllabe, il faut diviser la dernière syllabe du groupe précédent [mjɛʁ] en deux ['mjɛ - ʁə] et faire passer cette nouvelle dernière syllabe dans le groupe suivant : dans-la -lu miè / re-de-l'é-... Le résultat est artificiel, mais on remarquera que la syllabe accentuée est quasiment préservée : lu - miè / re - de ... ce qui en français est essentiel ;

7. au-beau-mi-lieu (dans la dernière syllabe, c'est une semi-consonne [ljø] et non pas une voyelle) ;

8. d'un-champ-de-blé (en parole naturelle, le e de de aurait pu être effacé : d'un champ d(e) blé).

 

Pouvez-vous relire lentement la phrase complète à voix haute en tapant sur la table avec votre main sur chaque syllabe accentuée (en gras) - il n'est pas nécessaire de faire des pauses entre chaque groupe, sauf si vous devez respirer :

/  La-pre-mière-fois  /  que-je-l'ai-vue  / e-lle-dor-mait   /  à-moi-tié-nue   /  dans-la-lu-miè / re-de-l'é-   / au-beau-mi-lieu   / d'un-champ-de-blé   //

 

Le contenu phonétique principal (à part le rythme) de cette longue phrase se trouve dans les syllabes accentuées. Observons-les de plus près...

On remarque qu'il s'agit de syllabes ouvertes, c'est-à-dire se terminant par une voyelle phonétique : [ fwa / vy / mɛ / ny / mjɛ(ʁ) / te / ljø / ble ].

On relève la présence de la voyelle antérieure arrondie fermée [y] (vue, nue), de la voyelle antérieure arrondie mi fermée [ø] (milieu), des voyelles moyennes [e] (été, blé) et [ɛ] (dormait, lumière).

Du côté des consonnes :   

[p, t, tj, k, b, bl, d (4) (pas de [g]), fw, (pas de [s]), ʃ, v, (pas de [z]), ʒ, m (2), mj(2),  mw,  n,  (pas de ɲ), l (5), lj, ʁ(3). Les consonnes simples et les groupes de consonnes (en particulier avec les semi-consonnes) sont plutôt diversifiés sur un si court extrait.

 

 

Pouvez-vous maintenant écouter le mp3 ci-dessous en articulant (avec ou sans voix) seulement les syllabes accentuées en gras avec toute votre attention. Attention à la précision des voyelles. Si vous êtes deux, l'un articule les syllabes en gras, et l'autre regarde son articulation. Puis, changez les rôles à la deuxième écoute.

 

 

D'un point de vue rythmique, il faut s'attarder un instant sur ces deux groupes :

dans-la-lu-miè / re-de-l'é-   /

Aidez-vous de la partition ci-dessous :

 

 

Il semble difficle de prolonger la note de la syllabe (lu-) miè--- pour commencer le groupe suivant par la dernière syllabe -re.

Recommencez jusqu'à ce que vos syllabes accentuées soient synchrones avec le chanteur Mouloudji. 

Un peu plus loin dans la chanson, on retrouve presque les mêmes paroles, mais le début est un peu différent. Pouvez-vous retrouver les 4 syllabes de chaque groupe? (la réponse un peu plus bas)

Et le lendemain quand je l'ai revue, elle dormait à moitié nue dans la lumière de l'été au beau milieu du champ de blé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Et le lend(e)main / quand je l'ai r(e)vue, OU quand j(e) l'ai revue...

 

Ecoutez maintenant les versions des mêmes extraits de 8 autres interprètes après Mouloudji : Marie-Paule Belle, Louis Chedid, Leila Bekhti, Claude François, Jacqueline Dulac, les Compagnons de la Chanson, et Sheila.

Observez les différentes façons d'interpréter les deux groupes problématiques : dans-la-lu-miè / re-de-l'é-   /.

La première fois que je l'ai vue, elle dormait à moitié nue dans la lumière de l'été au beau milieu d'un champ de blé.

Et le lendemain quand je l'ai revue, elle dormait à moitié nue dans la lumière de l'été au beau milieu du champ de blé.

N'hésitez pas à discuter en commentaire (sous ce post) des particularités rythmiques et phonétiques de chaque interprète : par exemple la liaison de Marie-Paule Belle dans "elle dormait-à moitié nue", ou les e prononcés par les Compagnons de la Chanson dans " que je l'ai vuE, à moitié nuE".

 

 

 

Pourquoi ai-je intitulé ce post : Un chewing-gum phonétique ? Le phonéticien écoute et réécoute les extraits sonores comme on mâche un chewing-gum. Je pense que de la même façon, l'apprenant à tout à gagner à tourner et retourner une phrase - deux vers d'un poème, un slogan, une réplique de film  - dans ses oreilles et dans son articulation, quand il s'amuse à parler à haute voix par exemple. C'est alors un excellent support à la déformation - comme un chewing gum, aux interprétations variées, à la carricature, bref, au travail phonétique !

 

Qu'allez-vous choisir comme chewing-gum phonétique : La première fois que je l'ai vue... ou Si t'as été à Tahiti ?

 

 

 

 

22 septembre 2020

Archive : Perfect French Pronunciation, de Knowles et Favard

[Dans la catégorie Archives, je présente un ouvrage de ma bibliothèque et j'en donne de courts extraits.]

 

KNOWLES, Mary H., DES COMBES FAVARD, Berthe (1924), Perfect French Pronunciation : a system of applied phonetics with drill in rhythmic French, Chicago, D.C. Heath and Company, 72 p.

 

      Voici la seconde édition du manuel : Perfect French Possible : Some Essential and Adequate Helps for French Pronunciation and Rhythm, écrit en 1910 par Mary H. KNOWLES, "membre actif de l'Association de Phonétique Internationale, Présidente pendant 37 ans du Club Français de Chicago, nommée Officier d'Académie le 16 Octobre 1902"... et par Berthe DES COMBES FAVARD, professeur de français à la Hyde Park High School de Chicago. Vous pouvez lire l'avant-propos et le sommaire de cette édition ici.

     L'ouvrage de 1924 présente, à mon humble avis, un intérêt essentiellement historique, les études de phonétique contrastive en français et en anglais ayant été largement developpées depuis. Mais de nombreux arguments du texte portent encore et tous sont une bonne base à la discussion.

     Voici la traduction de l'avant-propos.

 

 

Aux enseignants

Aux enseignants natifs français qu’il faudrait convaincre de l’utilité de cette méthode, et qui préféreraient laisser agir l’imitation naturelle, nous pouvons répondre que notre objectif est de réveiller le sens de l’imitation, de le cultiver, de le maintenir actif en ouvrant les oreilles et la compréhension de l’élève.

Aux enseignants américains de français qui ne seraient pas suffisamment sûr de leur propre accent pour utiliser cette méthode de comparaison entre les sons du français et de l’anglais, notre conseil serait d’étudier et de pratiquer quotidiennement  les exercices proposés. Ayant été obligés eux-mêmes de perfectionner leur prononciation de cette manière, ils seront plus aptes à l’enseigner à leurs élèves. Les voyelles anormales (« abnormal » = [y, ø, œ]) et les nasales ne peuvent être correctes que si les sons normaux sont maîtrisés.

Les premières leçons présentent des mots ne contenant ni voyelles anormales ni nasales et qui se ressemblent en français et en anglais. De même, tout au long du livre, les exemples ont été choisis en référence à leur simplicité, de même qu’à leur utilité dans les conversations quotidiennes.

Analyses et transcriptions sont présentées ensemble mais malgré ce fait, elles ne doivent jamais être transmises aux élèves en même temps. Une simple connaissance de la transcription permet de regarder la prononciation des mots dans un dictionnaire ou de l’indiquer rapidement et facilement par écrit, mais quand il s’agit d’énoncés et de phrases, il faut plus qu’un dictionnaire. L’élève doit être entrainé à la liaison et à l’enchaînement. La différenciation entre ces termes rend possible de traiter avec grande clarté de cet enchaînement des sons qui est essentiel à la fluidité du français.

Les exercices oraux et écrits progressifs tout au long du livre, permettront aux enseignants de comprendre la nécessité d’un travail quotidien régulier, qui pourra assurer une pureté sonore et une correction du rythme dès les premières étapes de l’apprentissage du français parlé.

 

     Voici le sommaire :

 

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   Pour illustrer le fait que la question rythmique est centrale - dès le titre, j'ai choisi de traduire le tout début de l'ouvrage puis une autre section (p. 39) qui aborde plus en détail les aspects rythmiques.

 

p.1

Différences de Prononciation

1. Les différences intrinsèques de prononciation entre le français et l’anglais sont :

- premièrement : le français est prononcé en avant de la bouche et non dans les molaires ;

- deuxièmement : les voyelles en français ne sont jamais « obscurcies » [ « obscured » ? centralisées ?] ou diphtonguées comme en anglais ;

- troisièmement : en anglais, un mot accentué sur la première syllabe commence avec beaucoup d’énergie qui décroit jusqu’à la fin du mot ; en français au contraire, la dernière syllabe sonore porte l’accent ; la dernière consonne prononcée avec une force explosive, alors que la syllabe initiale ne porte pas du tout d’accent.

L’étudiant doit garder ces principes à l’esprit ainsi que ce qui va suivre à propos du rythme.

 

Rythme

2.1. Les voyelles fusionnant dans les voyelles suivantes « Vowels melting into following vowels ») [ = les semi-consonnes] jouent un rôle important dans le rythme.

2. Les voyelles longues et courtes jouent un rôle important dans le rythme.

3. Les syllabes muettes jouent un rôle encore plus important dans le rythme.

4. L’accent tonique, ou syllabe accentuée, joue le rôle le plus important dans le rythme. Il marque la fin des groupes accentuels.

 

p. 39

Rythme

57. Le rythme est marqué beaucoup plus régulièrement en français qu’en anglais. On peut dire que la prose en français glisse (« scans »), tant ses pulsations rythmiques sont successives. La raison en est évidente. Les mots en anglais sont accentués sur la première, la deuxième, la troisième, quatrième ou cinquième syllabe, selon les cas, là où en français la pulsation est parfaitement régulière, puisque c’est seulement la dernière syllabe sonore du mot ou d’un groupe accentuel qui reçoit l’accent tonique.

La tendance des anglophones d’accentuer la première partie du mots semble plutôt brutale pour les oreilles françaises (« quite schocking ») : COrridor et caLOrifère, alors que le simple fait de placer un léger accent à sa place donne à ces mots leur vrai rythme français.

 

58. L’élève doit lire des pages de groupes accentuels, marquant le rythme régulièrement, donnant à chaque syllabe à peu près la même force, jusqu’à ce qu’il arrive à la dernière, légèrement plus forte. Il doit continuer à faire ainsi jusqu’à ce qu’il dépasse sa propension naturelle à accentuer les mots comme en anglais.

Il doit commencer son entrainement sur les groupes accentuels en étudiant et en lisant à haute voix §§41-69, puis choisir d’autres lectures faciles pour cette sorte d’exercice. S’il ne s’applique pas lui-même à un tel travail constructif de cette sorte, il acquerra probablement un français arythmique, et suivant il lui sera impossible de corriger ce qu’on appelle « l’accent anglais ».

 

 

 

 

 

     Enfin, pour attiser votre curiosité, certains exercices proposés ne sont pas sans rappeler le Work Out phonétique de Jean-Guy LEBEL*. Mais vous constaterez que l'ordre choisi ici est un ordre alphabétique (a, e, i , o , u)  et non phonétique [i, e, ɛ, a, ɔ, o, u, ... ]. Idem pour les consonnes : (b, c, d, f, g,...) et non [p/b, t/d, k/g ...]. Quelle différence? C'est comme si l'on organisait un entrainement musical en faisant se succéder les notes de la gamme par ordre alphabétique (do, fa, la, mi, ré, si, sol) et non en échelle diatonique (do, ré, mi, fa, sol, la, si). L'entraînement phonétique raisonné devrait toujours être organisé... phonétiquement, non?

 * LEBEL, Jean Guy (1990), Traité de correction phonétique ponctuelle, Québec : Les Editions de la Faculté des Lettres de l’Université Laval, 278 p.

 

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KNOWLES, Mary H., DES COMBES FAVARD, Berthe (1924), Perfect French Pronunciation : a system of applied phonetics with drill in rhythmic French, Chicago, D.C. Heath and Company, 72 p.

 

 

 

 

19 août 2020

Hésiter... et parler pour ne rien dire

 

    En découvrant à la radio la Valse hésitation de Rodolphe Burger (voir la vidéo et le texte ci-dessous), je me souviens avoir archivé deux documents sonores illustrant l'hésitation en français et que je me propose de partager ici :

1. un extrait d'un canular téléphonique de l'humoriste Jean-Yves Lafesse. Prétendant être Miss France 1938, il échange avec une femme apparemment d'un certain âge. Le résultat : plus de 90 secondes de paroles quasi sans contenu, d'improvisation et de "bruit communicatif" naturel (comme une extension de la fonction phatique de Jakobson). Cliquer ci-dessous pour entendre le mp3.

Miss_France_1938

2. un extrait du film Aurore, de Blandine Lenoir (2017), une scène entre les comédiennes Agnès Jaoui qui recherche du travail et Florence Muller, "employée Pôle Emploi sans mots". C'est donc une scène écrite et interprétée.

AuroreFilm

 

3. et donc, la Valse Hésitation de Rodolphe Burger :


Nous pourrions nous / Je vous l’avais proposé / Nous pourrions mais…
Aussi bien / Nous pourrions ne pas
A moins que / Peut-être / Vous vouliez…
Dans ce cas / Pourquoi pas
Ou alors / Ou alors non
Ou alors / Ou alors peut-être pas
Peut-être préférez-vous / Ne pas

Ou alors nous pourrions / Vous me l’aviez proposé je crois
Nous pourrions / Pourquoi pas / Décider
De laisser se faire / Le fameux pas / Le premier fameux pas
À moins que oui / À moins que non
À moins que plutôt pas

À moins qu’il vous en dise
À moins que oui / À moins que non
À moins qu’on se ravise / Dans ce cas oui
Ou plutôt non

 

 

 

    Ce qui me semble lier phonétiquement ces trois documents, c'est le rythme et la musique de l'hésitation en français. On retrouve des groupes rythmiques très courts, l'allongement de la dernière syllabe, parfois poussé à l'extrême, le Euh... d'hésitation souvent appelé pause sonore, et prononcé [Œ] (c'est-a-dire [ø] ou [œ] ou un timbre intermédiaire), ainsi que d'autres "bruits" : Oui oui oui, ah non, ah oui, Bah, ben, Holala, pfff, etc. Il existe d'autres caractéristiques syntaxiques et lexicales de l'hésitation, par exemple l'emphase sur les connecteurs, que je ne développerai pas ici.

    J'incite souvent très tôt les étudiants étrangers apprenant le français à adopter, en cas de besoin, le Euh d'hésitation, pour s'approprier ce geste prosodique de base en français et éviter l'émergence de [eee] hispanophone ou au [ʌ:m] anglo-américain par exemple (voir d'autres interjections de langue maternelle pouvant apparaître en français), marqueurs évidents d'accent non-natif.

 

    Si vous souhaitez partager un document illutrant les phénomènes oraux d'hésitation en français ou dans d'autres langues, ... n'hésitez pas ! La rubrique Commentaires ci-dessous est faite pour vous.

 

Par exemple, dans la série How I met your mother, le personnage de Robin joué par la comédienne canadienne Cobie Smulders hésite souvent après la conjonction "But", ce qui donne 'but um"  (bottom) ce qui est l'occasion de moqueries des autres personnages.

 

 

 

6 août 2020

Imagier Phonétique : entraînement intensif

 

 

 

     Et si l'été était l'occasion d'une petit gymnastique phonétique quotidienne en français?

     Voici donc une compilation de l'imagier phonétique auquel j'ai consacré beaucoup de temps : d'abord pour choisir le lexique de mots concrets et fréquents en fonction de la voyelle accentuée (c'est-à-dire la dernière voyelle phonétique de chaque énoncé), puis pour insérer ces mots dans des groupes rythmiques simples ; ensuite pour faire les enregistrements de ma famille et mes amis pour varier les voix en sexe, âge, etc., donc des voix variées non-professionnelles ; après, pour faire les photos et enfin pour monter le tout en diaporamas.

    En pratiquant l'écoute et la répétition sans être distrait par la forme orthographique des mots, vous vous concentrez seulement sur la forme sonore. Ce sont des exercices courts (moins de 3 minutes), votre concentration peut rester très active ! Les liens ci-dessous vous dirigent vers chacun de ces diaporamas d'entraînement.

     Alors profitez-en et exercez-vous avec ces voyelles typiquement françaises...

 

La voyelle antérieure arrondie fermée [y]

La voyelle antérieure arrondie mi-ouverte [œ]

La voyelle antérieure arrondie mi-fermée [ø]

Les voyelles antérieures étirées [e] et [ɛ]

Les voyelles antérieures arrondies [ø] et [œ]

Les voyelles postérieures [o] et [ɔ]

La voyelle nasale [ɛ̃]

La voyelle nasale [ɑ̃]

La voyelle nasale [ɔ̃]

 

 

https://dai.ly/x5odvsx

5 août 2020

Archive : Petite Phonétique Comparée, de Passy

[Dans la catégorie Archives, je présente un ouvrage de ma bibliothèque et j'en donne de courts extraits.]

 

    

 

     Voici malheureusement un livre qui part en miettes... Il s'agit de l'édition de 1922 de la Petite Phonétique Comparée des Principales Langues Européennes, de Paul Passy, le co-fondateur de l'Alphabet Phonétique International. La première édition date de 1905. Et je découvre sur internet que Forgotten Books en propose une réédition depuis 2018 !

     J'ai déjà évoqué cet ouvrage dès la création de ce blog, en citant les Remarques préliminaires.

     J'ai aussi déjà évoqué Paul Passy et sa collaboration à l'International Phonetic Association.

     Rares sont les livres à ma connaissance traitant de phonétique comparée dans plusieurs langues. A part l'ouvrage de Passy, je pense au magistral Comparing the Phonetic Features of English, French, German and Spanish, de Pierre Delattre (1965), dont il me faudra parler dans un prochain post.

     Cet ouvrage de Passy, rédigé dans un style et une orthographe (*rhytme) parfois surprenants, est novateur sur de nombreux points, je n'en citerai que quelques uns.

• Il me semble déjà remarquable que la moitié du texte (une soixantaine de pages) soit consacrée aux aspects suprasegmentaux, appelés ici Divisions du langage (groupes de souffle / force / intensité, rythme, syllabes, durée, intonation).

• Il évoque déjà l'acuité des voyelles, notion reprise par Petar Guberina et toute l'Approche Verbo-Tonale (1950-1960).

229] La différence de timbre entre les voyelles tient à la position qu'on donne aux organes en les articulant. Chaque position fait de la bouche une caisse de résonnance particulière qui modifie d'une certaine façon la voix produite par le larynx, comme des tubes de forme différente modifient le son produit par une anche de cor.

Pour comparer entre elles les résonnances propres à chaque position des organes il est bon de chucher les voyelles correspondantes, parce qu'alors on a affaire qu'à ces résonnances elles-mêmes (les modifications de hauteur du chuche étant insignifiantes), tandis qu'en prononçant les voyelles à voix haute, on peut sans s'en douter, élever ou abaisser le ton de la voix. On s'aperçoit alors aisément que si on prononce la série des voyelles :

u - o - ɔ - ɑ - a - ɛ - e - i

le timbre devient de plus en plus aigu.

Apparemment musicien, il pose finement la question de la transcription de l'intonation avant même les appareils de mesure et les courbes intonatives :

INTONATION

158] Nous avons déjà vu que la parole contient un élément musical, la voix, dont la hauteur varie avec les circonstances. Quand on chante, la voix passe constamment d'une note à une autre, les notes étant choisies de manière à former un ensemble harmonieux.

159] Il en est à peu près de même dans la parole ordinaire. Il y a pourtant une différence fondamentale. Dans le chant, chaque syllabe se prononce sur une note donnée ; ou bien, si on passe d'une note à une autre, ça se fait presque toujours d'un bond, sans intermédiaire. Dans la parole, la voix ne s'arrête guèresur une note ; elle ne passe pas non plus directement d'une note à une autre ; elle glisse tout le long de l'échelle musicale, monte ou descend plus ou moins rapidement, mais toujours par degrés insensibles. En musqiue j'écris par exemple :

Mais pour représenter la parole, la notation :

ne serait encore que très approximative. Il en résulte que les intervalles paraissent moins grands qu'ils ne le sont réellement."

 

 

     Je choisis comme extrait une section consacrée dans les Divisions du Langage, aux Groupes d'intensité / Groupes de Force. Ce que Wioland appelle les mots phonétiques, ce que d'autres appellent les groupes rythmiques, demeurent souvent étrangement ignorés des enseignants, alors qu'ils structurent fondamentalement la parole et imposent des contraintes fortes puisqu'ils définissent les syllabes accentuées et les syllabes non-accentuées. Si la terminologie varie d'un auteur à l'autre, la question de l'identification des groupes structurant le flux de parole reste bien cruciale.

 

GROUPES D’INTENSITÉ

1° GROUPES DE FORCE

Force du souffle

 

60] Si nous examinons un groupe de souffle quelconque, nous reconnaissons bientôt que toutes les parties qui le composent ne frappent pas notre oreille avec la même intensité. En nous plaçant à une certaine distance d’une personne qui parle, nous saisissons bien certains sons, certains groupes, tandis que d’autres nous échappent. Si nous sommes plus près, nous entendons tout, mais nous sentons pourtant que tout n’a pas la même force.

 

61] Par exemple, je prononce la phrase :

L’animal qui s’enfuit en courant.

Les groupes de sons –mal, -fuit, -rant, s’entendent certainement plus distinctement que les autres. Ça tient à ce que, en les prononçant, je chasse l’air plus fortement des poumons : alors les sons produits sont plus forts.

Cette force relative est tout-à-fait indépendante de la force d’ensemble avec laquelle on parle. La phrase citée, l’animal qui s’enfuit en courant, peut êtrecriée à pleins poumons ou murmurée à voix basse ; mais à moins d’intentions spéciales, on prononce toujours les syllabes –mal, -fuit, -rant, plus fort que les autres. C’est l’effet de la force relative du souffle. Quelle que soit leur force absolue, les syllabes –mal, -fuit, -rant, doivent être considérées comme relativement fortes, les autres comme relativement faibles, ou moyennes.

 

62] Analyser et représenter tous les degrés de force serait un travail gigantesque. La force relative est en partie déterminée par un principe rythmique. Les syllabes fortes et faibles alternent d’une manière assez régulière. Si dans un groupe de trois syllabes, la troisième est forte, nous pouvons être à peu près sûrs que la première est plus forte que la deuxième, à moins qu’il n’y ait quelques raison particulière d’appuyer sur la deuxième ; c’est ce qui a lieu dans les groupes animal, voulez-vous, tu comprends, Constantinople, Nabucodonosor. Ça nous dispense de représenter les degrés intermédiaires, dont la force relative découle le plus souvent de leur position même. […]

 

63] Or, l’oreille et l’esprit ont une tendance naturelle à grouper les parties moins fortes autour des parties plus fortes ; Quoique dans la phrase, l’animal qui s’enfuit en courant., il n’y ait aucune interruption, nous l’entendons volontiers comme si elle était divisée en trois parties.

L’animal     qui s’enfuit     en courant.

Ceci nous conduit à une deuxième division phonétique du langage ; nous pouvons diviser le groupe de souffle en groupes de force. Un groupe de force est l’ensemble des sons qui se groupent autour d’une syllabe relativement forte.

 

64] En général, un groupe de force se compose de deux ou trois mots étroitement liés par le sens, et dont l’un est plus important que les autres.

La division phonétique en groupes de force correspond donc à la division logique en mots, en ce sens que si plusieurs mots sont constamment réunis en un seul groupe, un seul mot n’est presque jamais réparti sur deux groupes. Dans un parler très lent, chaque groupe de force peut devenir un groupe de souffle. Quand un mot est isolé, il forme à lui seul un groupe de force et un groupe de souffle.

 

65] Dans une écriture rigoureusement phonétique, on écrit en un seul mot tout ce qui forme un groupe de force, ainsi

lanimal kisɑ̃fɥi ɑ̃kuʁɑ̃

et on marque les limites des groupes de souffle par un nombre de virgules proportionné à la durée de l’arrêt. Mais dans la plupart des textes phonétiques consacrés à l’enseignement, des raisons pratiques font conserver tels quels la division des mots et la ponctuation courante.

 

Accents de force

 

66] Quant à la force relative des diverses parties d’un groupe, il est facile de distinguer des syllabes fortes, moyennes et faibles. La syllabe forte est la plus importante, c’est autour d’elle que se groupent les moyennes et les faibles, généralement en suivant le principe rythmique énoncé au §62.

On dit souvent que la syllabe forte est accentuée ou porte l’accent de force ; que les autres sont les syllabes inaccentuées ou atones.

 

67] Dans l’écriture, on marque les syllabes fortes en les faisant précéder du signe (ˈ) ; au besoin les syllabes faibles sont précédées du signe (-), et les moyennes du signe (ˌ) ; mais les deux dernières peuvent ordinairement se sous-entendre. Une syllabe très forte se marque par (ˈˈ)

La phrase citée plus haut s’écrit donc :

ˌla-niˈmal ˌki-sɑ̃ˈfɥi ˌɑ̃-kuˈʁɑ̃

ou plus simplement et en conservant la division des mots :

l aniˈmal ki s ɑ̃ˈfɥi ɑ̃ kuˈʁɑ̃

 

 

Accent normal

[…]

70] En Français, l’accent normal n’est pas très marqué ; il n’y a pas entre ls syllabes fortes et les faibles l’opposition qu’on remarque par exemple en Allemand. Aussi, le premier soin d’un étranger qui étudie le Français, doit-il être de prononcer toutes parties de la phrase, avec une certaine égalité, sans « avaler » les syllabes faibles, sans donner aux fortes un relief exagéré.

71] Cependant, il y a une différence en Français aussi. Dans chaque groupe de force, c’est la dernière syllabe qui se prononce un peu plus fort que les autres, à moins qu’elle ne contienne la voyelle ə, alors c’est la syllabe précédente qui est forte. (Il va sans dire qu’il s’agit des syllabes prononcées ; le reste ne compte pas en phonétique).

Comme en Français, quand plusieurs mots sont très étroitement unis par le sens (et par conséquent forment un groupe de force), c’est le dernier qui est d’ordinaire le plus important, ce que nous venons de dire peut encore s’exprimer ainsi : dans une phrase prononcée normalement, la dernière syllabe de tous les mots importants est accentuée.

[…]

Les enfants qui commencent à parler réduisent souvent un mot à sa dernière syllabe plus ou moins altérée.

 

72] Dans d’autres langues, l’accentuation est basée sur des principes très différents. En Espagnol, en Italien, en Portugais, l’accent, qui est d’ailleurs plus marqué qu’en Français, peut porter sur la dernière syllabe des groupes comme en Français ; mais il peut aussi porter sur une des deux syllabes précédentes. Ainsi on a :

en Italien : virˈtù (vertu), aˈmore (amour), aˈmabile (aimable), prenˈdevano (ils prenaient) ;

en Espagnol : aˈmor (amour), aˈmigo (ami), ˈarboles (arbre)

en Portugais : aˈmor (amour), aˈmigo (ami), leˈgitimo (légitime).

Le même genre d’accentuation se retrouve dans les autres langues romanes, et même dans les patois de la France du Midi ; ainsi en Béarnais :

beˈtɛt (veau) ; ˈɔmi (homme) ; ˈkrabo (chèvre), etc.

73] Il est intéressant de constater, que sauf de rares exceptions, c’est toujours la syllabe correspondante qui est accentuée dans les langues romanes : Fr. aˈmour, It. aˈmore, Esp. aˈmor, Béarnais aˈmu ; - Fr. aˈmi, It. aˈmico, Esp. aˈmigo, Béarnais aˈmik ; - Fr. ˈpauvre, It. ˈpovero, Esp. ˈpobre, Béarnais ˈpraube.

Dans tous ces mots, c’est l’accent latin des mots amorem, amicum, pauperem qui a été conservé ; seulement en Français, les syllabes qui suivaient l’accent ont disparu ; dans les autres langues romanes, elles ont été conservées en tout ou en partie.

 

 

 

 

 

Voici la Table des matières (cliquez sur la photo pour l'agrandir) :

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